« Atout cœur ! »
J’aime assez comparer la vie à une partie de belote (pensée pour Manou <3). Nous commençons tous la partie avec un jeu en main différent. Pourtant, un seul atout (= couleur (pique, cœur, carreau, trèfle) choisie comme étant la plus forte sur une période donnée) est choisi pour une manche entière : nous ne partons pas tous à égalité.
Je crois que c’est une erreur de se dire que l’on a tous les mêmes chances pour les mêmes choses. On est tous profondément différent.e.s, et il faut à mon sens en être fier.e et se lancer dans des directions qui nous permettent d’assumer cette différence.
Dans une partie, plusieurs manches se succèdent, et nous avons régulièrement la possibilité de choisir l’atout. Puisque nous demandons l’atout qui correspond au jeu que nous avons en main, nous pouvons ainsi choisir un environnement plus favorable pour utiliser nos cartes. Néanmoins, les amateurs de belote sauront que si l’on choisit l’atout mais qu’à la fin de la manche nous avons remporté moins de points que nos adversaires, nous perdons tout. Choisir l’atout correspond à saisir sa chance. Cela ne marche pas toujours, mais c’est la seule option pour ne pas constamment suivre les autres joueurs. La seule option pour ne pas toujours « passer » son tour…
Connaître son jeu
Le plus difficile est selon moi de savoir quelles cartes nous avons en main pour faire le choix de l’atout. L’atout étant ici la fameuse orientation professionnelle. Cela est particulièrement compliqué lorsque l’on est encore adolescent et que l’on ne se connaît pas encore parfaitement.
Ces cartes ne correspondent pas uniquement à nos capacités : certaines représentent aussi nos valeurs et nos tempéraments. Nous ne sommes pas uniquement ce que nous savons faire : être bon en anglais ne signifie pas que l’on doive devenir interprète. Cette orientation est intéressante si on estime que le mode de vie corresponde à nos aspirations. Si l’on pense que cela nous fera vibrer.
S’orienter en conscience de ses cartes
Selon moi, il n’y a pas d’erreur d’orientation si le choix a été fait en pleine conscience de ses capacités et de ce qui nous fait vibrer. Car alors, même s’il s’avère que l’on décide de changer, on en ressortira en se disant que :
- On a appris des éléments qui nous intéressaient ;
- On aura été dans un environnement favorable pour grandir et apprendre à se connaître.
Grâce à ça, même s’il y a réorientation, elle sera relativement sereine.
Laisser les éléments extérieurs à leur juste place
Choisir un atout sans prendre en considération le jeu que l’on a en main, simplement parce qu’il est considéré comme étant :
- Le plus fort ;
- Celui qui rapporte le plus de point ;
est la meilleure façon de se prendre un mur. Peut-être que les cartes qui arriveront par la suite nous permettront-elles d’assurer le minimum ? Ce n’est pas certain. Et surtout, toutes celles qui faisaient partie de notre jeu dès le début vont être jetées sans donner de points. Pourtant, n’étaient-elles pas notre force initiale ?
L’image que l’on a d’une orientation, l’argent qu’elle puisse rapporter, la reconnaissance que l’on pense en obtenir…tous ces éléments ne peuvent pas être les éléments déterminants du choix initial. Le risque de décalage entre la personne que l’on est et le rôle à jouer est trop important.
On apprend beaucoup aussi de cette expérience, mais plus cette expérience dure dans le temps, plus l’apprentissage se fait dans la douleur.
Valoriser ses cartes
Connaître son jeu est l’élément déterminant même si ce n’est pas facile. Savoir que l’on ait besoin de créativité au quotidien est aussi important que d’être bon en éco. Sentir que l’on ait besoin de contact humain, ou que l’on soit doué d’empathie, est aussi essentiel que d’avoir de bonnes capacités en maths. Le deuxième ne prime pas sur le premier : le deuxième doit être un outil permettant d’arriver dans un contexte favorable au premier.
Par ailleurs, souhaiter garder la partie boulot comme étant surtout le moyen d’assurer ses loisirs et assumer que l’on se dirige vers un boulot qui ne nous semblera pas toujours drôle, c’est ok aussi. On n’est pas obligé de choisir le boulot de ses rêves si l’équilibre de vie se fait autrement. L’essentiel est de faire ce choix consciemment.
Assumer ses cartes faibles
La carte universelle que tout le monde n’a pas
Les lignes précédentes peuvent paraître à côté de la plaque pour quelqu’un qui se heurte en premier lieu à un manque de moyens. Car il y a également une « petite » carte déterminante que personne ne doit occulter : la capacité financière. Sans même parler d’autres pays, en France nous n’avons pas tous les mêmes chances d’accéder aux mêmes orientations. Je crois qu’il est important de s’en souvenir, d’être reconnaissant.e quand on est du côté favorable, et d’être conscient.e de la facilité avec laquelle on a pu prendre une direction quand d’autres ont vu le manque d’argent les freiner.
A toi qui es du côté moins favorable, je voudrais juste te dire une chose : tu ne le sais peut-être pas encore mais lorsque tu auras atteint ton objectif, tu seras le/la plus malin.gne. Tu auras l’intelligence de ceux qui ont dû « faire avec ». N’oublie pas d’où tu viens car cette aptitude sera une de tes forces et un de tes atouts de différenciation. On t’appellera quand les issues sembleront bloquées parce que tu auras les ressources nécessaires pour voir les choses différemment. Tu as une détermination particulière et tu es précieux.se. Les débuts sont plus difficiles, mais cela en vaut la peine. Essaie de voir ce manque d’argent comme étant une carte qui te manque, tout en constatant que tu en as plein d’autres en main. Il y a peut-être des combinaisons qui pourraient te permettre d’y palier.
La carte universelle que tout le monde n’a pas
Les cartes que l’on peut ajouter à sa main
A toi qui sais aujourd’hui que tu t’es trompé d’atout OU toi qui t’ennuies et souhaiterais changer de main : la partie n’est pas finie ! Tu peux rester à chaque manche celui qui suit, par peur de te planter…tu survis mais sans avoir le sentiment d’avoir utilisé tes cartes à bon escient. Mais tu peux aussi, à un tour qui te paraît plus favorable, décider que c’est le moment de saisir cette chance, de choisir l’atout et de te lancer. Il y a des moments dans la vie où on risque moins. Il y a des rencontres qui nous accompagnent dans ce risque.
La vie est moins hasardeuse qu’une partie de belote : si maintenant n’est pas le moment rien ne t’empêche d’ajouter des cartes dans ton jeu (te former, provoquer des rencontres en allant dans les réseaux correspondants, contacter une personne qui t’es inspirante…) pour être prêt.e le jour où tu le sentiras. Sans t’en rendre compte tu vas provoquer ce moment plus favorable : tu vas provoquer ta chance. Faire un pas après l’autre fait moins peur que d’envisager la course entière.
J’espère que ces quelques lignes vous auront donné envie de connaître vos cartes et de voir le jeu de la vie différemment. Et n’oubliez pas : dans une même partie il y a des plis que l’on ne remporte pas…mais cela n’empêche pas :
- d’aimer jouer ;
- de gagner la partie !